Chambre de Godefroy et Lison

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La chambre était spacieuse et la vue sur le Serein s’offrait largement des deux fauteuils en bois sculptés habillés de velours écarlate.

Le crépitement du feu dans la grande cheminée de pierre semblait bercer Niria endormie dans son petit lit en bois sculpté de feuilles d’or.

Les hauts murs de pierre décorés de quelques tapisseries, le sol pavé couvert d’un épais tapis abritaient le lit couvert d’une courtepointe ivoire surmonté d’un ciel au ciel du même cramoisi que les lourds rideaux bordés.

Quelques lourds coffres de bois aux ferrures ciselées,

Une armure à l’équilibre précaire.

Jouxtée d’une luxueuse pièce d’eau, la pièce était claire, sobre, élégante… agréable.

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Lison s’était levée de bonne heure. Au dehors le givre semblait figer le paysage dans un calme sans fin. Calme, tout comme cette chambre encore inconnue qu’elle observait et tentait se s’approprier.
Elle releva la couverture sur Niria endormie paisiblement, puis silencieusement sortit les rubans, robes, bijoux et pomme de senteurs achetés à Paris avec sa sœur Sakou. Elle sourit au souvenir de cette incartade dépensière et insouciante.

Sakou, Sucal, Tigalia, tous étaient si loin…

Ses pensées vagabondaient alors qu’elle étalait ses trésors sur le lit. Que choisir comme parures le jour de son mariage avec Godefroy ? Elle était bien trop lointaine pour arriver à se décider. Della pourrait l’aider, si elle acceptait de la rejoindre.

Aelis était venue me voir, me disant que Lison, ma belle-soeur, désirait me parler.

Cette distraction me plut !
Depuis que je n'avais plus toute la gestion de Beaumont sur les épaules, je me sentais plus libre de m'octroyer des moments agréables. Aussi, abandonnai-je sans remord, le Livre des Vertus que j'étudiais pour l'idée d'une conversation amicale.

Je me demandais si Lison apprécierait un bon petit vin...Bah, après tout, je ne risquais pas grand chose...Je passai donc par la réserve et choisis une bouteille.

Quelques minutes plus tard, je frappai à la porte de la chambre que mon frère et Lison occupaient.
Lison...Lison, c'est moi, je peux entrer ?

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Lison sourit en entendant la voie de Della et alla rapidement lui ouvrir.

Entre, je suis ravie de te voir, merci d’avoir accepter de venir.

Elle se décala pour laisser Della pénétrer dans la chambre et ses yeux se mirent à briller en voyant la délicieuse bouteille. Puis regardant gênée le chaos de rubans, voiles et chemises qui régnait dans la pièce :

Humm…. J’ai été faire quelques emplettes à Paris avec ma sœur, et je crains d’avoir été bien trop enjôlée par les commerçants…

Elle invita Della à s’asseoir dans un des fauteuils miraculeusement épargné, avant de se laisser choir sur le lit dans un amoncèlement de rubans colorés qui s’envolèrent avant de retomber doucement. Ses épaules s’affaissèrent, et les regardant perplexe soupira :

Mon Dieux, que choisir pour le mariage. Pourrais-tu m’aider, je n’en ai aucune idée, et Godefroy est si…difficile.

Son regard se fit soudain lointain :

Comment être sure de ne pas se tromper, comment être sure de faire le bon choix. Peut-on savoir si deux couleurs assemblées s’accorderont ?

Elle resta silencieuse quelques instants puis posa son regard sur la bouteille de vin et sourit.

Quelle bonne idée tu as eu ! je raffole de ton vin.

Laissant les étoffes glisser au sol, elle alla chercher deux coupes.

Qui sait, le vin sera peu être bon conseiller !

Et le vin fut débouché et versé...Eternel recommencement, pour le plaisir des palais et des esprits.

Il est vrai que Lison avait fait débauche d'achats et que l'étalage sur son lit était...extraordinaire.
Par la quantité, bien sûr mais aussi par la qualité de ces étoffes.
Un seul coup d'oeil suffisait à faire prendre conscience du bon goût de cette jeune femme.

Je n'avais pas la fibre vestimentaire mais je savais apprécier le beau. Et là, c'en était !

Après un sourire complice à ma Lison, la laissant emplir nos verres, je pris quelques tissus en main, tâtant et soupesant les tissus de toutes couleurs, de tous filages.

Godefroy est difficile ? Ah...je l'ignorais. Il faut dire que nous ne discutons pas souvent frusques lui et moi. Je ris, lâchai la robe que je tenais pour prendre un voile fin mais à la belle tenue.
Tu sais Lison...je veux bien t'aider mais...Je posai délicatement le voile, l'étendant avec soin avant de passer les doigts sur des rubans de velours. Je ne suis guère avertie en la matière...ni celle des vêtements ni celle du mariage...
Je me tournai alors vers Lison et l'observai tout en prenant le verre.
Je n'avais jamais pris le temps, encore de la regarder attentivement. Elle était jolie, ses yeux clairs étaient mis en évidence naturellement par une chevelure foncée, des traits fins dessinaient un visage jeune à la peau fine. Plus grande que moi, j'avais remarqué qu'elle s'habillait toujours de blanc...teinte qui lui allait plutôt bien. Mais qu'allait-elle choisir pour se marier ? Le rouge traditionnel ou le blanc, moins fréquent ? Godefroy avait une bien jolie dame à ses côtés. Et cela me fit plaisir, pour lui.

Mes lèvres trempèrent dans le Beaumont avant que : Je crois que la première chose à faire serait de choisir une couleur ou une gamme de couleurs...As-tu déjà une idée ?
Je posai mon verre sur un guéridon, un peu plus loin que le lit pour ne pas risquer de renverser, prête à entamer la course aux vêtements.

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Lison sentit le regard que Della posait sur elle. Encadrés de boucles blondes, les grands yeux bleus de la jeune femme étaient particulièrement expressifs et mystérieux, suivant ses émotions. Que son regard soit attendri, sévère, amusé, glacial, doux, gourmand ou moqueur, celui des hommes sur elle restait le même, charmé.

Elle regarda Della glisser ses doigts sur les étoffes et sourit en découvrant encore un nouveau regard, sensuel celui-ci.

Citation :: Je ne suis guère avertie en la matière...ni celle des vêtements ni celle du mariage...

Hum… moi non plus pour tout t’avouer, je sais juste que j’ai en horreur les fioritures inutiles.

Puis dans un éclat de rire un peu nerveux:

Quand au mariage… je vais apprendre, j’espère juste que la leçon sera agréable, douce et paisible.

Fronçant les sourcils et grattant le coin de sa bouche :

Est-ce vraiment ce que tu veux ? Une apaisante monotonie, dans ce cas tu as bien mal choisi ton époux !

Regardant Della les yeux plein de malice:

Quoique… peut être pas...

Goutant le vin avec délice elle s’interrogeait sur le difficile choix du mariage.

Lison avait remarqué les regards échangés entre Della et le Baron. Celui-ci semblait avoir un caractère pour le moins fort.
Ces regards elle ne savait comment les interpréter. Della était elle attirée et charmée par le défit que représentait cet homme, ou bien pliait elle l’échine devant son devoir pour le bien de sa famille ?

Citation :: Je crois que la première chose à faire serait de choisir une couleur ou une gamme de couleurs...As-tu déjà une idée ?

Relevant les yeux et posant son verre:

Je sais que ce n’est pas conventionnel, mais l’ivoire me plait. Le rouge habituel est trop voyant, je serai mal à l’aise, ou alors en petites touches. Et puis j’aime les contrastes.

Je n’ai jamais rêvé étant enfant du jour de mon mariage, d’où mes hésitations aujourd’hui. J’ai toujours été plus encline à rêvasser le nez au vent que de me soucier de mes tenues.

Prenant un fin voile elle tenta tant bien que mal de l’ajuster à sa coiffure. L’effet dégoulinant d’un jour de pluie était parfait !
Elle regarda Della en faisant la moue, puis feignant l'innocence :

Dans tes rêves de mariage de petite fille, portes-tu ce genre de choses sur la tête ?

Des rêves de petites filles...en avais-je seulement eu ?
D'aussi loin que je me souvenais, je n'avais entrevu d'autre avenir que les murs d'un couvent jusqu'à ce jour où j'en avais fait le mur, justement.

Mais depuis, l'eau avait couler sous les ponts et j'étais devenue non pas nonne mais chef de famille.
Avec, évidemment, tout ce que cela entraînait...y compris le mariage afin de permettre une descendance et donc, des héritiers.

Je secouai doucement la tête, dans une réponse négative.
Non, Lison. En fait, je n'avais jamais pensé vraiment au mariage avant...récemment.
Mais il me semble que le voile est indispensable...et la couleur ivoire est très belle.
Et si...J'attrapai un large ruban rouge foncé et le passai à la taille de Lison....tu essayais avec ça ? Une belle robe rehaussée d'une ceinture rouge...ça serait joli.

Je fronçai légèrement les sourcils, me rendant compte qu'il me faudrait, moi aussi, bientôt, envisager ce genre de préparatifs.
Il me faudrait être belle et surtout séduisante, ce jour-là...Sans avoir l'air d'y toucher, je continuai : Dis-moi, Lison...que faut-il prévoir pour un mariage ? Robe, voile...autre chose ?

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Citation :: En fait, je n'avais jamais pensé vraiment au mariage avant...récemment.

Faisant mine de se regarder dans le miroir, Lison camoufla un sourire entendu sous celui de la satisfaction de l’assortiment de couleur.

Oui Della l’ivoire et ce rouge sont d’un gout exquis.

Se tournant et retournant devant son reflet.

Mais le voile, vraiment non, je n’aime pas.

Citation :: Lison...que faut-il prévoir pour un mariage ? Robe, voile...autre chose ?

Haussement rapide des sourcils.

A-t-elle de réels projets de mariage ? La question est t’elle aussi innocente qu’elle le parait ?

Lison regarda Della essayant de trouver un geste une expression qui lui permettrai de la déchiffrer. Comment répondre à cette question ? Sincèrement en disant que peu importait la robe, le voile ou le ruban, tant que l’amour, la complicité et l’envie était présente ? Si Della envisageait un mariage arrangé, cette réponse était terrifiante.

Tentant de rester le plus naturelle possible :

Une robe, un voile, des rubans et tout ce que tu juges nécessaire, mais en premier lieu un mari !

Relève son regard vers Della et plante le gris dans le bleu puis ajoute :

Et l’envie de se marier je crois...

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[de longs mois plus tard]

Lison était à nouveau dans cette chambre qu'elle avait jadis aimée. Assise devant un petit guéridon, elle se souvenait de son arrivée à la noël, perdue avec Niria dans blottie dans ses bras, de son mariage, de Niria grimpant dans les rideaux et courant dans les bras de sa tante.

Oui elle s’était sentie chez elle ici. Comme tout avait changé rapidement… Calmement, elle commença à écrire.

Citation :: A toi Della de Volvent d‘Amahir-Euphor,

Que te dire….

Toi qui affirmes à l’Assemblée être favorable aux appels à candidature tous les quatre mois, vouloir interdire les cumuls de plus de six mois et coupe court à toute discussion à ce sujet au conseil ducal. Où dois-je donc te croire ?

Attendre le secret du conseil ducal pour dévoiler tout ce mépris. Non que j’ai été surprise de ton peu d’estime à mon égard, mais déçue par ta lâcheté, et aujourd’hui par ton inconstance.

Si tu me connais un peu, tu sais que n’ai pas pour habitude d’utiliser de tels mots, mais ils sont justes le reflet d’une pensée que je ne peux te cacher plus longtemps. Ne crois pas qu’ils résultent de divergences politiques, mais le visage que j’ai découvert en toi a rayé tous sentiments que je pouvais avoir à ton égard.

La Renardière restera un beau souvenir, nous nous croiserons certainement dans d’autres lieux, mais à moins d’y être contrainte pour des raisons évidentes de travail, mon regard ne se posera plus sur toi.

Puisse le Très Haut te guider.

Elle souffla doucement sur le vélin, et demanda à un serviteur de le porter à la maitresse des lieux.

Puis elle se leva, laissa son regard planer une dernière fois sur la pièce avant de sortir en refermant doucement la porte.

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Cependant, Pascal fut bien ennuyé parce que cela faisait très longtemps que Della ne vivait plus ici.
Elle avait quitté Beaumont dans les semaines qui avaient suivi le déshonneur de son frère, estimant qu'elle n'avait plus le droit de rester sur des terres retournées à la Bourgogne.

Il l'aurait bien expliqué à Lison mais elle aussi était partie.

Bah, il ferait porter la lettre à Sémur, à la Maison avec Pignon sur Rue.

Là aussi, le messager serait bien embêté parce que là non plus, Della n'habitait plus.

Gageons qu'un jour, peut-être, à la grâce de Dieu, la destinataire recevra peut-être cette sacrée missive.
La suite nous le dira.
Ou pas.

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